Les biofilms, un problème majeur en hygiène des établissements de soins

biofilm-illustration

Les biofilms sont des communautés de micro-organismes (bactéries et/ou champigons) qui se développent conjointement sur les surfaces, au sein d'une matrice qui les protège du milieu extérieur. C'est une source importante de contamination des surfaces et ils peuvent être à l'origine de la dissémination de bactéries pathogènes au sein d'un établissement de soins. La lutte contre les biofilms est un enjeu hygiénique majeur.

Formation des biofilms

La première phase de fomation d'un biofilm est l'adhésion. Les micro-organismes se déposent sur une surface de manière passive, réversible (1) puis s'y fixent de façon permanente en queleques heures grâce à des adhésines (2). Les bactéries se multiplient et forment des colonies au sein d'une matrice protectrice (3) formée en 6 à 12 heures.

Au fur et à mesure de la croissance du nombre des microorganismes, apparaissent des formes bactériennes dites "persistantes", très tolérantes aux agressions (4).

Enfin, intervient la phase de dispersion : le biofilm relâche des micro-organismes de façon continue dans l'environnement, permettant la colonisation de nouvelles surfaces, et éventuellement la propagation de germes pathogènes (5).

schema developpement biofilm bacterien

 

Problèmes de résistance aux désinfectants et aux antibiotiques

Le biofilm permet l'émergence de bactéries dites "persistantes", hautement tolérantes aux antibiotiques et désinfectants.

Plusieurs facteurs entrent en jeu :

  • La matrice agit comme une barrière protectrice, en limitant la diffusion des antiseptiques au sein du biofilm.
  • Ce microenvironnement influe sur le métabolisme bactérien, favorisant la survie dans des conditions de stress.
  • L'accès limité aux nutriments au sein du biofilm ralentit le métabolisme bactérien, rendant les micro-organimes moins sensibles aux antibiotiques.
  • Certaines bactéries contribuent à mettre en place des mécanismes ioniques permettant l'expulsion d'antibiotiques.
  • La proximité des bactéries favorise l'échange génétique des résistances aux antibiotiques, ou une coprotection.

Biofilm et infections

Les biofilms représentent un risque important de contamination en établissement de soins. Ils peuvent coloniser diverses surfaces, agissant comme des réservoirs de micro-organismes pathogènes et s'intégrant dans un cycle de contamination impliquant les patients, les agents de transport (air, eau, personnel) et le matériel médical.

Des études menées dans des hôpitaux ont révélé la présence de biofilms contenant des bactéries résistantes aux antibiotiques sur des surfaces supposément stériles après nettoyage. Des biofilms sur des robinets ont été liés à des cas de légionellose et d'infections néonatales parfois mortelles. Les fibroscopes posent un réel problème de désinfection, les biofilms installés dans le canal opérateur étant une source de contamination de patient à patient1.

Les biofilms sont bien sûr bien présents en milieu vétérinaire2.

 

biofilm catheter

Biofilm contenant des staphylocoques sur la surface d'un cathéter.

 

Lutter contre les biofilms

Eviter leur formation

Le mieux est bien sûr d'éviter la formation des biofilms. Le nettoyage précoce des surfaces et du matériel permet de décrocher les micro-organismes avant qu'ils ne soient fixés activement, et avant la formation de la matrice protectrice. C'est pourquoi il est indispensable d'intervenir rapidement sur le matériel souillé, mécaniquement d'abord par frottage et rinçage, puis biologiquement par application de désinfectants.

Détruire les biofilms

Différents moyens peuvent être mis en oeuvre :

  • Perturbation mécanique : brossage, grattage, jet d'eau. Une action mécanique peut détacher le biofilm de la surface et rendre les bactéries plus accessibles aux désinfectants.
  • Enzymes dégradant la matrice : certaines enzymes peuvent  s'attaquer aux composants de la matrice protectrice. Plusieurs nettoyants du commerce en contiennent.
  • Agents chélateurs : des composés comme l'EDTA peuvent déstabiliser certains biofilms.
  • Combinaison de désinfectants : l'utilisation séquentielle ou simultanée de différents désinfectants ayant des modes d'action complémentaires.
  • Revêtements anti-adhésifs : l'application de revêtements spéciaux sur les surfaces peut empêcher l'attachement initial des bactéries et donc prévenir la formation de biofilms.
  • Optimisation des protocoles de nettoyage : adapter les procédures de désinfection, en termes de durée d'exposition, de concentration des agents, de température, peut aider à surmonter la résistance des biofilms.

Il est souvent nécessaire de combiner ces différentes techniques.

Sources :

  1. Thomas Vanzieleghem, Michel Delmée, Les biofilms en milieu hospitalier : quels sont les enjeux pour l’hygiène hospitalière ? Nosoinfo 2023, 27, 3.
  2. A. Muller, E. Guaguère, Le biofilm : définition et importance, PratiqueVet  2016, 51, 739-742